Agen. Frelons asiatiques : "On n'est plus dans le rationnel"
L'hiver, les arbres qui se dénudent et les nids de frelons asiatiques qui apparaissent. De plus en plus nombreux paraît-il. L'un des spécialistes de la chose dans le pays, Jean Haxaire, de Laplume, calme le jeu.
Pas de panique. C'est en trois mots, le résumé de la pensée du correspondant du Muséum d'histoire naturelle de Paris, Jean Haxaire, à propos de l'invasion du frelon asiatique en Lot-et-Garonne.
Vous observez le frelon asiatique depuis cinq à six ans dans le département. Il y a péril en la demeure ?
On observe une stabilisation de la population, voire une stabilisation basse, une phase de décroissance, avec ou sans piégeage d'ailleurs. Il se maintient dans les agglomérations comme Agen par exemple, ou dans les grandes villes, là où les prédateurs n'existent pas, là où le développement des ruches en milieu urbain est en cours aussi. A contrario, avec ses prédateurs naturels comme la pie par exemple, sa population apparaît décroissante.
Moins de frelons donc. Votre affirmation tord le cou à l'impression générale ?
Le frelon asiatique est une espèce invasive, comme pouvait l'être le doryphore en son temps ou le faisan, lâché pour le plaisir des chasseurs. À ce titre, lorsqu'elle apparaît sur un territoire, l'espèce invasive se multiplie très rapidement, et tend parfois vers la pullulation, dans les trois ou quatre premières années. Par la suite, la prédation s'organise d'elle-même et on observe que les prédateurs s'attaquent aux jeunes nids dès le printemps
[…] Dire en revanche qu'on pourrait avoir un nid par arbre est un non-sens pour la simple raison qu'il se poserait un problème de nourriture pour l'espèce[…] Les zones qui ne sont pas touchées aujourd'hui ne le seront sans doute pas… » Dites-vous alors qu'il ne faut pas chercher à détruire les nids ? Non, il faut s'en débarrasser en cas de danger. Ce serait imprudent quand les frelons sont présents près d'un bâtiment public, et néfaste s'ils sont proches des ruches d'un apiculteur. L'impact économique est alors indéniable. En revanche, et le message a du mal à être entendu, la lutte serait efficace si on rayait l'espèce de la carte. C'est impossible. On se fait plaisir en tuant une fondatrice à l'issue d'un piégeage, mais il faut savoir qu'on élimine simplement une éventuelle rivale à une autre fondatrice qui va ainsi trouver le terrain libre. Plus on lutte contre l'invasion, plus on maintient le frelon dans sa stratégie de défense, donc de multiplication. » Comment expliquer cette presque psychose autour de cet hyménoptère ? On n'est plus dans le rationnel. Jetez simplement un coup d'œil au vocabulaire utilisé : péril jaune, l'invasion ne fait que commencer, etc. Le frelon asiatique, ça vient de loin, ça pique, et en plus ça tue nos abeilles. Comme beaucoup, je suis né avec l'idée que trois piqûres de notre frelon européen tuent un homme. Sans un terrain allergène chez l'humain, il en faut en vérité une centaine. Un autre fantasme est que le dard du frelon asiatique est plus long. C'est aussi faux. Il est plus petit que son voisin européen, de quatre ou cinq millimètres. » Il reste qu'il a provoqué des décès… « C'est exact. Nous avons été informés de ces drames qui sont, pour une partie d'entre eux, liés au frelon asiatique. Mais déranger un nid de frelons européens (et même de guêpes) donne le même résultat. Je le redis, nous ne sommes plus dans le rationnel. » Quels conseils pouvez-vous donner aux riverains d'un nid ? Il faut d'abord savoir que le frelon asiatique ne retourne jamais l'année suivante dans le même nid. À une exception près, au Pays basque, nous n'avons jamais vu de cas de recolonisation. Si tuer une fondatrice ne sert pas à grand-chose, puisqu'elle est immédiatement remplacée, détruire un nid en octobre (ou plus tard) n'est pas utile non plus. À cette époque de l'année, le nid est pratiquement vide, et écologiquement mort puisque les sexués sont déjà partis. Je ne vois pas l'intérêt de détruire les nids en hiver, d'autant que c'est le plus souvent aux frais des riverains, et fort cher. On peut, et il est même recommandé d'attaquer par traitement un nid en activité, à condition de l'enlever après. Car il faut savoir qu'il est rapidement colonisé par les oiseaux, qui peuvent être à leur tour intoxiqués par les produits.Découvert en 2006
Le Lot-et-Garonne est pointé sur la carte de France comme étant le département d'importation du frelon asiatique, chez un producteur de bonzaïs du Villeneuvois. «Ce n'est qu'une piste» indique Jean Haxaire. Le premier signalement officiel est en avril 2006 à Francescas, mais son arrivée est datée à la fin 2004.
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