2016 met EDF sous tension

Une diminution des effectifs d’EDF pourrait réveiller la colère des partenaires sociaux du groupe, qui, depuis déjà des mois, manifestent leur incompréhension vis-à-vis de choix stratégiques et de décisions politiques.

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Ce début d’année 2016 est tendu du côté d’EDF. Jeudi 21 janvier, un comité central d’entreprise pourrait mettre le feu aux poudres chez l’électricien, qui sort d’une période de paix sociale, achetée très chère par l’ancien PDG Henri Proglio. De sources syndicales, la direction devrait annoncer 4 000 suppressions de postes - sans licenciements - d’ici 2018. EDF emploie environ 68 000 salariés.

Les partenaires sociaux réagissent vivement, d’autant plus qu’ils manifestent depuis plusieurs mois des inquiétudes sur la santé de l’électricien. Le 10 décembre dernier, pour la première fois de l’histoire d’EDF, les élus du CCE avaient même déclenché un droit d'alerte devant la situation économique et sociale de l’entreprise. Dans un communiqué, les syndicats pointaient du doigt "les manœuvres qui conduisent inéluctablement EDF dans une impasse industrielle, économique et sociale".

Des syndicats inquiets

Le déclencheur de cette initiative était la sortie du CAC40 d’EDF, actée le 21 décembre dernier, alors que le titre avait perdu plus de 40 % ces dernières années.

Les syndicats dénonçaient par exemple la mise en demeure de la Commission européenne relative aux concessions hydrauliques détenues par EDF. Bruxelles impose à la France d’ouvrir à la concurrence ses barrages hydroélectriques détenus à 80 % par EDF et qui sont une rente importante pour le groupe.

Dans le même temps, dans le cadre de la loi sur la transition énergétique, le gouvernement vient d’imposer à EDF la fermeture des deux réacteurs de Fessenheim (Haut-Rhin) qui contribuent à hauteur de 600 millions d’euros aux résultats d’EDF.

Quels financements ?

Les syndicats et les actionnaires indépendants ne comprennent pas non plus le mode de financement des deux EPR britanniques qu’EDF veut construire à Hinkley Point, pour lesquels la décision finale d’investissement est attendue dans les jours à venir. Ce projet à 24 milliards d’euros pourrait être financé par la cession de 6,5 milliards d'euros d'actifs en 2016. Cela toucherait entre autres une partie des 15 réacteurs britanniques exploités par EDF Energy.

Dans le même temps, il faudra aussi payer le rachat d’Areva NP pour 2,5 milliards d’euros. Une opération subie par EDF, qui vient déjà de s’engager dans l’onéreux grand carénage, un chantier visant à prolonger la durée de vie des réacteurs nucléaires à 60 ans. Un investissement de 50 milliards d’euros d’ici 2025.

L’équation économique semble difficile à tenir alors que les gouvernements successifs refusent à EDF toute augmentation des tarifs de l’électricité. Par ailleurs, EDF, déjà très endetté, ne peut utiliser cette voie de financement que de manière limitée. L’Etat pourrait éventuellement renoncer à ses dividendes d’environ 2 milliards d’euros par an. Bercy n'a pas fait ce choix même s'i le minsitère a accepté que le versement se fasse cette année en titres.

Une actualité qui tombe mal

En parallèle de ces contraintes politiques et de ces choix industriels difficiles, l’actualité ne sert pas non plus EDF. La revue à la hausse - 25 milliards d’euros - du devis de Cigeo, pour enfouir les déchets nucléaire de haute activité, a forcé EDF à alerter sur ses résultats 2015. L’électricien va devoir passer une provision de 800 millions d’euros, affectant son résultat net de 500 millions d’euros.

Dans les mois qui viennent, les résultats des tests sur la cuve de l’EPR de Flamanville (Manche), qui présente une malfaçon, pourraient mener à un nouveau coup dur pour EDF en cas de rejet de la pièce par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Un nouveau retard sur ce chantier alourdirait encore la facture de 10 milliards d’euros.

Un besoin de transformation

EDF n’est pas le seul électricien à souffrir. En Europe, les allemands E.on et RWE ont subi de lourdes pertes ces dernières années, au point que tous deux ont annoncé une scission de leur groupe entre les activités traditionnelles (fossiles et nucléaire) et les activités renouvelables.

Engie a également passé plusieurs milliards d’euros de dépréciations d’actifs et a redessiné entièrement son activité européenne pour la consacrer à la transition énergétique. EDF va sans doute devoir passer par cette étape de transformation profonde pour assurer son avenir… Reste à savoir dans quelle mesure et, surtout, si la société le fera assez vite.

Performance technologique

Gardons espoir puisqu’au moins une bonne nouvelle vient éclairer ce début d’année 2016 chez EDF, c’est la surperformance du parc nucléaire français. En 2015, les 58 réacteurs français ont produit 417 térawattheures (TWh), se situant au-dessus de l’objectif de 410-415 TWh. C’est une hausse de 0,2% par rapport à 2014. Une performance d’autant plus importante que la météo de décembre 2015 a été très clémente. Une preuve que l’électricien conserve toujours une vraie qualité opérationnelle et technologique, une assise sur laquelle Jean-Bernard Lévy, l’actuel PDG, pourra s’appuyer pour bâtir le nouvel EDF

Ludovic Dupin

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