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Deux pesticides augmentent le risque de Parkinson

Les chercheurs des NIH ont examiné 110 personnes atteintes de Parkinson et un groupe témoin de 358 sujets indemnes sélectionnés parmi une cohorte de 90.000 professionnels (agriculteurs, jardiniers…) utilisateurs de produits phytosanitaires. CRISTINA QUICKLER/AFP

L'un des deux, la roténone, est un insecticide naturel utilisé en agriculture biologique.

Des chercheurs américains des Instituts nationaux de la santé (NIH) viennent de publier une étude dans la revue Environmental Health Perspectives montrant que les personnes exposées au cours de leur vie à la roténone ou au paraquat, deux pesticides, ont plus de risques que les autres de développer un jour la maladie de Parkinson, une affection neurodégénérative. Or si le paraquat est un herbicide synthétique dont la dangerosité, notamment pour l'homme, est connue depuis des lustres, la roténone est un insecticide «naturel». Extraite de différentes plantes tropicales, comme le roten (Paraderris elliptica), elle est utilisée depuis des décennies en agriculture biologique… De quoi contredire la distinction abusive souvent entretenue dans l'esprit du public entre substances naturelles, présentées comme étant forcément «bonnes» ou inoffensives pour la santé, et produits chimiques, mauvais par définition.

Selon Freya Kamel, coauteur de la publication, «la roténone inhibe directement le fonctionnement des mitochondries». Ces dernières années, plusieurs études ont montré qu'il existe un lien entre la maladie de Parkinson et le dérèglement de ces petites inclusions chargées d'approvisionner les cellules en énergie. De son côté, le paraquat «accroît la production de certains dérivés d'oxygène qui peuvent avoir des effets néfastes sur les structures cellulaires», ajoute cette scientifique.

Les chercheurs des NIH ont examiné 110 personnes atteintes de Parkinson et un groupe témoin de 358 sujets indemnes. Tous avaient été sélectionnés parmi une cohorte de 90.000 professionnels (agriculteurs, jardiniers…) utilisateurs de produits phytosanitaires, ainsi que leurs conjoints, suivis dans le cadre de l'étude FME (Farming and Movement Evaluation). «La maladie de Parkinson est 2,5 fois plus fréquente chez les sujets ayant déclaré avoir utilisé de la roténone», écrivent les auteurs. Le tout, même lorsque l'exposition date de plus de quinze ans avant le diagnostic.

Les «bio» n'ont aucune solution de remplacement

S'agissant du paraquat, ils estiment que cette substance «joue un rôle clé dans le déclenchement de la maladie» sans toutefois quantifier le facteur de risque, et alertent les autorités sanitaires sur le fait que cet herbicide, interdit en Europe depuis juillet 2007, reste l'un des plus utilisés dans le monde, notamment dans les bananeraies. Son emploi a toutefois toujours été strictement limité aux agriculteurs. Ce qui n'est malheureusement pas le cas de la roténone. «Son usage très répandu, jusqu'à encore récemment, tant chez les professionnels que chez les particuliers suggère que beaucoup de gens ont été exposés, s'inquiètent les chercheurs américains. Étant donné que la roténone est extraite de plantes, elle a été considérée comme un pesticide “bio” et a été couramment utilisée comme insecticide domestique, dans les jardins familiaux et l'agriculture, ainsi que pour tuer les poissons. » En particulier les espèces envahissantes qui prolifèrent dans les étangs de pisciculture.

En Europe, elle a été retirée du marché en octobre 2008 mais les agriculteurs bénéficient jusqu'en avril 2011 d'une dérogation pour l'utiliser encore sur la vigne (contre la flavescence dorée) et certains arbres fruitiers. «La roténone a longtemps été utilisée en bio parce que c'est une substance très peu rémanente dans l'environnement, mais à l'époque où nous l'avons introduite dans nos cahiers des charges personne ne savait qu'elle pouvait être toxique pour l'homme lors de son application», se défend Monique Jonis, de l'Institut technique de l'agriculture biologique. Pour l'heure, les «bio» n'ont aucune solution de remplacement pour protéger leurs cultures. Sauf peut-être le pyrèthre, une autre substance naturelle en attente d'homologation. Une situation qui embarrasse certaines ONG. Comme le remarque Gil Rivière, dans la revue Agriculture et environnement, le dernier document de l'association Générations futures, portant sur les dérogations dont bénéficient certains pesticides interdits dans l'Union européenne, ne fait nullement mention de la roténone et de ses propriétés neurotoxiques.

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